Mines : Et vous, à 13 ans, vous faisiez quoi ?
Au beau milieu de Cerro Rico, rencontre avec Freddy, 16 ans, mineur depuis l'âge de 13 ans.
Au beau milieu de Cerro Rico, rencontre avec Freddy,
16 ans, mineur depuis l'âge de 13 ans.
Freddy m'apostrophe pour me vendre des pierres et dévale la centaine de mètres nous séparant. Je lui explique pourquoi je suis ici ; Guillermo, du CDR, prend le relais et lui précise qu'il réalise un "inventaire" des jeunes qui travaillent dans la mine et commence son "interrogatoire". Freddy à 16 ans pèse seulement 48 kg. La séance avec la balance au beau milieu de la montagne est certes insolite, mais aussi très instructive puisque la moitié des jeunes souffrent de dénutrition. Sa maman, Margarita, garde la mine (la famille vie dans une cahute en pierre a l'entrée de la mine) et son papa, Francisco, est à La Paz, gravement malade. Freddy a 2 frères : Moises (6 ans) et Juan José (10 ans) ainsi que 2 soeurs : Maritza (8 ans) et Léonela (11 ans).
"Si je suis devenu mineur, c'est parce qu'il est nécessaire de maintenir ma famille" me dit-il très sévèrement (traduction littérale). Je sent bien le poids de ses mots ; Freddy est déjà un homme du haut de son mètre soixante et ses 16 ans... devenir mineur à l'âge de 13 ans parce qu'on est chargé de famille, nécessairement ça vous fait mûrir plus vite... Mais où est donc passée son enfance ? son adolescence ?
Qu'en est-il de celle de son frère (10 ans) qui arpente la montagne en quête de touristes à qui vendre des pierres ? "ça dépend de la chance" me dit-il, "certains jours je gagne 30 à 40 bolivianos, d'autres 0... les touristes ne veulent pas toujours amener des pierres dans leur sac à dos quand ils voyagent longtemps"... Moises, le petit dernier (6 ans), semble perplexe, il veut à tout prix que je lui achète des pierres...
Entré à 13 ans à la mine comme aide aux mineurs plus âgés, il a fallu qu'il achète lui même son propre équipement : bottes, casque, lampe, gants (cela représente plus de 150 bolivianos ; on comprend pourquoi il ne possède pas tout l'équipement...) ; Maintenant, les autres mineurs lui font confiance et le laisse perforer seul, il est autonome. Perforation de la roche, préparation des explosifs, chargement en sac et transport de minéral sur son dos, chargement du camion à la pelle... et vous à 13 ans, vous faisiez quoi ?
Il y a une petite place pour l'école après la journée de travail de 19h à 22h... "mais c'est pas facile, car je suis fatigué" me précise Freddy. "je voudrais devenir architecte ou ingénieur ; ce que je préfère, c'est les maths". Mais derrière ces rêves, une dure réalité... il est très difficile en effet de faire face au coût de l'école. En effet, si l'accès est gratuit, les écoles demandent un uniforme et aussi beaucoup de fournitures (papiers, plastiques, crayons divers...) et l'achat des livres est onéreux. "55 b pour mon dernier livre d'anglais" précise freddy. "J'ai du rater plusieurs jours d'école pour travailler plus à la mine pour l'acheter... j'aimerais vraiment qu'on m'aide pour étudier".
Freddy ne nous en a pas parlé, mais sans doute, comme beaucoup d'autres jeunes de la mine, il souffre aussi d'un manque d'aide à la maison. 85% des femmes travaillant sur la montagne sont illettrées... seulement 36% des enfants accèdent au lycée...
Des projets, il en a plein la tête... étudier tout d'abord (c'est tout ce qu'on lui souhaite)... et aussi avec ses collègues mineurs, il voudrait percer une salle dans la mine pour y faire un musée et attirer les touristes... et un peu plus loin, un espace plus grand avec des bancs pour s'asseoir et y faire du théâtre... Freddy a bien compris l'intérêt des touristes ; il peut gagner l'équivalent de son salaire journalier (environ 20 b) en faisant visiter la mine aux touristes (les tarifs des agences sont de 30 à 75 b / personne), en quelques heures seulement avec un peu de chance (car il y a des touristes qui négocient des visites quasi gratuites !). Bien sur, les policiers à l'entrée du Cerro Rico, avec un pourboire des agences (de la corruption... oui, oui) veillent à ce qu'il n'aborde pas les touristes... "mais sans se faire voir ou en payant le policier, je me débrouille" me dit-il !
Le projet du CDR, pour Freddy et les autres jeunes mineurs du Cerro Rico est de leur fournir une aide pour accéder à l'école. Environs 1 000 jeunes travaillent à l'intérieur de la mine, mais combien voudront bénéficier de ce programme d'aide ? Le CRD va aider les jeunes, en payant les fournitures et livres scolaires quand la famille ne peut le faire tout d'abord... en payant l'accès à des cours (toujours en fonctions des possibilités de la famille) du soir pour leur permettre d'accéder à des études qualifiantes ensuite : artisan soudeur, mécanicien, menuisier...
Pour ce faire, une identification des jeunes est commencée (aujourd'hui 200 connaissent ce programme et souhaitent y participer). Un travail en étroite collaboration avec le Fédération des Coopératives Minières est déjà mis en place. Un local du CDR, au pied du Cerro Rico, est en cours d'aménagement. Celui-ci offrira la relation de proximité nécessaire à ce projet et à bien d'autres...
Au beau milieu de Cerro Rico, rencontre avec Freddy,
16 ans, mineur depuis l'âge de 13 ans.
Freddy m'apostrophe pour me vendre des pierres et dévale la centaine de mètres nous séparant. Je lui explique pourquoi je suis ici ; Guillermo, du CDR, prend le relais et lui précise qu'il réalise un "inventaire" des jeunes qui travaillent dans la mine et commence son "interrogatoire". Freddy à 16 ans pèse seulement 48 kg. La séance avec la balance au beau milieu de la montagne est certes insolite, mais aussi très instructive puisque la moitié des jeunes souffrent de dénutrition. Sa maman, Margarita, garde la mine (la famille vie dans une cahute en pierre a l'entrée de la mine) et son papa, Francisco, est à La Paz, gravement malade. Freddy a 2 frères : Moises (6 ans) et Juan José (10 ans) ainsi que 2 soeurs : Maritza (8 ans) et Léonela (11 ans)."Si je suis devenu mineur, c'est parce qu'il est nécessaire de maintenir ma famille" me dit-il très sévèrement (traduction littérale). Je sent bien le poids de ses mots ; Freddy est déjà un homme du haut de son mètre soixante et ses 16 ans... devenir mineur à l'âge de 13 ans parce qu'on est chargé de famille, nécessairement ça vous fait mûrir plus vite... Mais où est donc passée son enfance ? son adolescence ?Qu'en est-il de celle de son frère (10 ans) qui arpente la montagne en quête de touristes à qui vendre des pierres ? "ça dépend de la chance" me dit-il, "certains jours je gagne 30 à 40 bolivianos, d'autres 0... les touristes ne veulent pas toujours amener des pierres dans leur sac à dos quand ils voyagent longtemps"... Moises, le petit dernier (6 ans), semble perplexe, il veut à tout prix que je lui achète des pierres...
Entré à 13 ans à la mine comme aide aux mineurs plus âgés, il a fallu qu'il achète lui même son propre équipement : bottes, casque, lampe, gants (cela représente plus de 150 bolivianos ; on comprend pourquoi il ne possède pas tout l'équipement...) ; Maintenant, les autres mineurs lui font confiance et le laisse perforer seul, il est autonome. Perforation de la roche, préparation des explosifs, chargement en sac et transport de minéral sur son dos, chargement du camion à la pelle... et vous à 13 ans, vous faisiez quoi ?
Il y a une petite place pour l'école après la journée de travail de 19h à 22h... "mais c'est pas facile, car je suis fatigué" me précise Freddy. "je voudrais devenir architecte ou ingénieur ; ce que je préfère, c'est les maths". Mais derrière ces rêves, une dure réalité... il est très difficile en effet de faire face au coût de l'école. En effet, si l'accès est gratuit, les écoles demandent un uniforme et aussi beaucoup de fournitures (papiers, plastiques, crayons divers...) et l'achat des livres est onéreux. "55 b pour mon dernier livre d'anglais" précise freddy. "J'ai du rater plusieurs jours d'école pour travailler plus à la mine pour l'acheter... j'aimerais vraiment qu'on m'aide pour étudier".
Freddy ne nous en a pas parlé, mais sans doute, comme beaucoup d'autres jeunes de la mine, il souffre aussi d'un manque d'aide à la maison. 85% des femmes travaillant sur la montagne sont illettrées... seulement 36% des enfants accèdent au lycée...
Des projets, il en a plein la tête... étudier tout d'abord (c'est tout ce qu'on lui souhaite)... et aussi avec ses collègues mineurs, il voudrait percer une salle dans la mine pour y faire un musée et attirer les touristes... et un peu plus loin, un espace plus grand avec des bancs pour s'asseoir et y faire du théâtre... Freddy a bien compris l'intérêt des touristes ; il peut gagner l'équivalent de son salaire journalier (environ 20 b) en faisant visiter la mine aux touristes (les tarifs des agences sont de 30 à 75 b / personne), en quelques heures seulement avec un peu de chance (car il y a des touristes qui négocient des visites quasi gratuites !). Bien sur, les policiers à l'entrée du Cerro Rico, avec un pourboire des agences (de la corruption... oui, oui) veillent à ce qu'il n'aborde pas les touristes... "mais sans se faire voir ou en payant le policier, je me débrouille" me dit-il !
Le projet du CDR, pour Freddy et les autres jeunes mineurs du Cerro Rico est de leur fournir une aide pour accéder à l'école. Environs 1 000 jeunes travaillent à l'intérieur de la mine, mais combien voudront bénéficier de ce programme d'aide ? Le CRD va aider les jeunes, en payant les fournitures et livres scolaires quand la famille ne peut le faire tout d'abord... en payant l'accès à des cours (toujours en fonctions des possibilités de la famille) du soir pour leur permettre d'accéder à des études qualifiantes ensuite : artisan soudeur, mécanicien, menuisier...
Pour ce faire, une identification des jeunes est commencée (aujourd'hui 200 connaissent ce programme et souhaitent y participer). Un travail en étroite collaboration avec le Fédération des Coopératives Minières est déjà mis en place. Un local du CDR, au pied du Cerro Rico, est en cours d'aménagement. Celui-ci offrira la relation de proximité nécessaire à ce projet et à bien d'autres...
